Comprendre la fluctuation du prix du cacao

Partout en ce moment, on parle de cet or brun et pour de bonnes raisons puisqu'entre le mois de novembre 2023 jusqu'à avril 2024,

le cours a été multiplié par 3 !
Chez Grain de Sail, notre activité de chocolatier est directement concernée.

le cours du cacao

Sources : https://www.boursorama.com/bourse/matieres-premieres/cours/_CJ/

Depuis des années, Grain de Sail a adopté une stratégie de primes et d’ajustement du prix d’achat du cacao pour proposer un salaire plus digne à nos producteurs en République Dominicaine et au Pérou car les cours du cacao étaient historiquement trop bas. Sans tomber dans l’excès spéculatif du moment, l’augmentation du cacao n’est pas une si mauvaise chose, en permettant une meilleure rémunération des producteurs. Evidemment l’augmentation devra se reporter sur les prix de vente de nos chocolats … pas vraiment le choix.

Au-delà, nous percevons aujourd’hui des signaux clairs qui démontrent que la belle mécanique environnementale planétaire est en train de s’enrayer. Devons nous en être étonnés ? Pas vraiment …

Cela fait quelques décennies que notre volonté farouche de croissance du PIB (indice mis au point à la sortie de la crise de 1929) s’est logiquement traduite par une décroissance environnementale majeure.

Tiens tiens … la planète terre aurait donc aussi des limites ?

Cette décroissance est même devenue très palpable : le changement climatique d’un côté (des phénomènes météo plus fréquents et plus extrêmes ... jusqu’à la crise du cacao) et de l’autre, la chute brutale de biodiversité qui s’illustre notamment par l’absence d’insectes sur nos parebrises en été alors que dans les années 80 on risquait clairement l’accident sans nettoyage toutes les 2h.

La crise du cacao est due principalement à des mauvaises récoltes successives en Côte d’Ivoire et au Ghana qui représentent à eux seuls plus de 2/3 de la production mondiale. Ces mauvaises récoltes (diminution de 15% des volumes récoltés) s’expliquent par des aléas climatiques (sécheresses suivies d’inondations entraînant des dégâts et des maladies sur les cultures) mais aussi et surtout par des pratiques peu durables, telles que :

1

Agriculture intensive de cacaoyers (en monoculture)

2

Utilisation des pesticides qui détruisent la biodiversité et les sols et à terme diminuent les rendements

3

Non renouvellement de cacaoyers vieillissants (qui finissent par produire moins).

Evidemment, nos comportements de consommateurs ne font qu’encourager ces méthodes puisque notre appétit pour le chocolat peu cher et de basse qualité ne fait qu’augmenter (plus de 20% de croissance de consommation en 5 ans).

Nous en voulons toujours plus pour toujours moins … 

alors même que nous faisons face à une potentielle pénurie de cacao.

Mais alors, que peut-on faire pour corriger nos excès ?

Revenons aux fondamentaux :

Relocaliser tout ce qui est relocalisable

Favoriser les circuits courts

Produire moins mais mieux

Les voiliers cargo Grain de Sail par exemple quand le transport reste nécessaire

Transporter moins et transporter mieux

Des produits à longue durée de vie, réparables, recyclables et des aliments BIO qui favorisent la biodiversité et la santé humaine

Et pour les consommateurs que nous sommes tous :

CONSOMMER MOINS, CONSOMMER MIEUX 

En clair, devenir plus sélectifs dans nos achats en privilégiant la qualité à la quantité.

Et si la crise du cacao représentait en fait une opportunité ?

Ne pourrait on pas imaginer une économie plus qualitative ou le plaisir n’est plus systématiquement attaché au « toujours plus » ? 

Face à ce raisonnement, la rémunération minimum devient vite un sujet.

Une personne qui au 20 du mois ne sait plus comment se nourrir ou s’abriter correctement n’en a évidemment rien à faire des sujets environnementaux ou des achats qualitatifs forcément plus couteux (voir la pyramide de Maslow). 

Pyramide de Maslow

L’accès aux produits de qualité doit devenir possible pour tous via une meilleure équité sociale … mais à condition de devenir plus raisonnable sur les quantités … sinon le portefeuille ne suit pas et la planète trinque.

L'opportunité est là ! À nous de la saisir ! 

4 avril 2024

Jacques Barreau, Directeur général de Grain de Sail